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L’Opportunity Fire

Le 25 octobre 2003, par Philippe Rohmer

Pour inaugurer cette rubrique, nous vous proposons de vous replonger un court instant dans votre classeur de règles favori, pour relire le paragraphe A7.25. Il s’agit effectivement de ce si méconnu Opportunity Fire. A quoi sert-il, que représente-t-il dans la réalité, comment utiliser cette option au mieux ? Voici quelques éléments de réponse qui vous permettront de rajouter un peu de piquant dans vos scénarios.

Vous trouverez un PDF de cet article en bas de page.


Rappeler ce qu’est l’Opportunity Fire dans les règles ASL n’est peut-être pas inutile.

Lors de la PFPh, certaines unités du joueur en phase peuvent être désignées pour participer aux tirs d’AFPh sans subir les traditionnelles pénalités de cette phase. Presque toutes les unités peuvent profiter de cette possibilité, sauf les véhicules qui en sont irrémédiablement exclus [1]

Simulation et réalité

Mais que peut donc bien représenter l’Opportunity Fire dans la réalité ? Le découpage en phase adopté pour ASL semblait permettre de simuler toutes les situations, alors à quoi sert ce marqueur supplémentaire ?
En fait, la réponse se cache dans les manuels de tactiques militaires. Un coup d’oeil rapide nous apprend que " l’assaut est une manoeuvre qui combine le feu et le mouvement " et que les unités qui y participent se décomposent en unités en appui, en soutien, en couverture (l’élément " feu ") et en unités en mouvement. Le rôle de chaque type d’unité participant à l’assaut est clair : Les unités en mouvement sont la raison même de l’assaut : elles doivent parvenir jusqu’à la position adverse et l’enlever. La partie " progression " est au moins aussi importante que la partie " assaut final ". Aussi bénéficient-elles durant la progression de l’aide d’autres unités restées en arrière. Les unités en appui sont le premier élément de cette aide : elles ont pour mission de préparer le terrain et faire en sorte que la progression soit facilitée. En gros, elles doivent " faire baisser la tête " aux tireurs adverses avant que la progression ne commence.

Les unités en soutien, deuxième élément de cette aide, n’interviennent que lorsque la progression a commencé. Elles doivent engager et neutraliser les unités adverses découvertes durant la progression, et qui risqueraient de menacer les unités en mouvement.
Enfin, les unités en couverture participent à la protection de la manoeuvre en surveillant les autres directions du champ de bataille. Leur rôle est finalement d’empêcher que l’ensemble du dispositif ne soit pris à revers durant la manoeuvre. Voilà pour la réalité du champ de bataille.

Mais comment tout ceci est-il traduit dans ASL ?

Les unités en appui sont tout naturellement celles qui tirent durant la PPPh [2]. L’unicité de leur action est d’ailleurs traduite par le marqueur Prep Fire, qui interdit à ces unités toute autre action durant le tour. Les unités en mouvement sont évidemment celles qui se déplacent durant le tour, c’est-à-dire durant la MPh. Rien à dire de plus, si n’est que leur capacité de tir est logiquement moindre puisqu’elles ont perdu une partie du tour pour se déplacer.
Les unités en couverture ne sont pas représentées par des marqueurs, car leur rôle est préventif et se traduit surtout par leur position sur la carte. Comme elles doivent réagir à une contre-attaque ennemie, elles interviendront surtout durant le tour de jeu adverse.
Les unités en soutien sont représentées par ce qui nous intéresse depuis le début : les unités désignées pour l’Opportunity Fire.En effet, une fois que les unités amies se sont déplacées durant la MPh, elles peuvent intervenir contre les unités adverses qui se seraient dévoilées, avec une capacité de tir intacte. En effet, elles n’ont pas eu à se déplacer et leur mission est prévue depuis le début du tour ; il n’y a donc pas lieu de les pénaliser. Ainsi, le fait que ces unités tirent durant l’AFPh n’est qu’un artefact de simulation, un artifice nécessaire pour simplifier le jeu. En réalité, ces unités interviennent tout au long de la MPh, et donc pour une durée comparable à celle des unités de la PFPh.

Voilà donc à quoi sert l’Opportunity Fire : aider les unités en mouvement durant leur progression. Toutefois, on peut formuler quelques remarques quant à la simulation proposée dans ASL. Les unités en mouvement connaissent le résultat des tirs d’appuis, ce qui n’est malheureusement pas le cas dans la réalité. On butte une fois de plus sur le traditionnel problème de l’omniscience du joueur de wargame. Deuxième conséquence : les unités utilisant l’Opportunity Fire sont aussi plus " intelligentes " qu’elles ne le devraient, puisque le joueur connaît à l’avance les cibles qu’il aura à " engager ". Toutefois, ce point disparaît lorsque l’on a affaire à des unités Hidden ou Concealed. Nous verrons dans la suite de cet article que l’Opportunity Fire trouve toute son utilité dans ces cas-là. Enfin, le rôle des unités en couverture n’est pas clairement distingué, puisque quel que soit le rôle joué au tour précédent, presque toutes les unités [3] sont disponibles en défense pour le tour du joueur adverse, alors que par exemple, les unités en mouvement devraient être encore en mouvement.

Voilà donc pour la raison d’être de l’Opportunity Fire dans le système de jeu ASL. Le joueur peut effectivement coordonner sa manoeuvre en groupant ces unités en 4 catégories, selon la tâche à exécuter. Cela demande peut-être un peu plus de rigueur dans la préparation d’un assaut, mais le réalisme d’une partie d’ASL s’en trouve nettement amélioré. Lors de la préparation d’un assaut, le joueur en phase va devoir affecter une tâche à chacune de ses unités. En pratique, il doit décider qui va tirer durant la PFPh, qui va se déplacer et quelles sont les unités à placer en Opportunity Fire. En fonction de la situation, le choix peut ne pas être évident. Un prochain article sera consacré aux unités à déplacer durant la MPh. Aujourd’hui, nous nous intéresserons seulement à la répartition entre Opportunity Fire et Prep Fire.
En effet, quitte à ne pas monter à l’assaut, quand une unité doit-elle tirer ? Nous avons vu que, en terme de performance, il n’y avait aucune différence entre les unités en Prep Fire et les unités en Opportunity Fire : toutes deux peuvent tirer à pleine puissance. Pourtant, beaucoup de choses peuvent changer entre la PFPh et l’AFPh.

Les mauvaises surprises

Pour commencer par le plus désagréable, examinons les mauvaises surprises qui pourraient attendre un joueur voulant faire tirer toutes ses unités en Opportunity Fire. Le pire est évidemment que le joueur n’ait jamais l’occasion de faire tirer ses unités. N’oublions pas que le joueur adverse a une phase entière à sa disposition pour malmener les unités du joueur en phase : la DFPh. Il serait vraiment trop bête de perdre des unités sous le feu ennemi sans qu’elles aient eu le temps de tirer. D’où les recommandations suivantes :

 Ne désigner que des unités qui bénéficient d’une protection suffisante, +2 ou +3 au moins.

 Ou alors, disposer de plus d’unités en Opportunity Fire que ne peut en éliminer l’adversaire. Ceci revient à dire que le choix d’utiliser l’Opporlunity Fire ne doit pas se limiter à quelques unités. On risque de les perdre durant la DFPh si le joueur adverse se sent vraiment menacé.

 Privilégier l’utilisation des mortiers avec observateurs. Tant que ces unités restent Concealed, elles seront la plaie du joueur adverse. Leur efficacité est légèrement réduite lorsqu’on utilise un observateur, mais mieux vaut cette gêne que de perdre le mortier à un moment critique.

D’autre part, toute sorte d’écrans peuvent se créer durant la MPh pour masquer des lignes de tir qui étaient auparavant favorables : véhicules, tirs d’artillerie, etc... Ces écrans sont autant de risques d’avoir des DRM supplémentaires durant l’AFPh et dont on se serait bien passé.

Les désagréables

D’autre part, on ne doit pas mésestimer la situation future lorsque l’on désigne les unités pour un Opportunity Fire. Autrement dit, ne pas espérer des événements improbables voire impossibles. Beaucoup d’éléments ne changeront pas entre la PFPh et l’AFPh.

Aucune condition météo ne peut changer en si peu de temps. C’est une lapalissade, mais inutile d’espérer que la pluie cesse ou qu’un vent indélicat vienne dissiper un écran de fumée (mais y a-t-il vraiment des joueurs qui planifient leur offensive en fonction d’un éventuel changement de météo ?). Tout ceci se joue au début du tour de jeu et n’est pas modifié pendant son déroulement. Plus subtilement, n’espérez pas non plus éliminer un Vehicle Dust ennemi et trop gênant en détruisant le véhicule responsable durant la Prep Fire. F11.74 nous rappelle qu’un Vehicle Dust n’est retiré qu’à la PFPh suivante.

De manière générale, on ne peut que conseiller la prudence à un joueur qui chercherait à profiter d’hypothétiques améliorations entre le PFPh et l’AFPh. Si le gain n’est pas assuré, mieux vaut tirer dès la PFPh.

Les utiles

Finalement, il nous reste à examiner tous les petits événements, probables ou improbables, qui pourraient rendre l’Opportunity Fire plus attractif que le Prep Fire.
Les Vehicle Dust amis peuvent disparaître durant la MPh. Il suffit d’arrêter le véhicule responsable ou de le déplacer en dépensant plus de 2MP par Hex. Nous avons là l’occasion de réaliser de beaux écrans mobiles, sous le couvert desquels l’infanterie se déplace en étant relativement bien protégée. Il suffit de déplacer les véhicules en dernier dans la MPh. pour libérer le champ de tir des unités en Opportunity Fire, sans que les unités s’étant déplacées n’aient subi le FFMO (voir A8.1).

Les mêmes tactiques sont utilisables avec les tirs d’artillerie (+1 TEM au travers d’une Blast Area) ou avec les Smoke tirées depuis les véhicules [4]. A chaque fois que l’adversaire dispose d’un FFE:C présent sur la carte, on peut espérer que la Blast Area disparaisse durant la DFPh. En effet, il devra tirer un nouveau Black. Chit pour disposer encore de l’écran protecteur durant l’AFPh, ce qui se fera de plus en plus
improbable de tour en tour.

Des unités ennemies Concealed ou Hidden peuvent être enfin visibles. En effet, si celles-ci ont décidé de riposter durant la MPh ou la DPPh, elles ont perdu du même coup leur immunité. C’est le moment d’en profiter et c’est l’occasion d’utiliser l’Opportunity Fire dans son véritable rôle. En effet les unités Concealed ou Hidden ne peuvent pas être engagées efficacement durant la PFPh. Le joueur en phase n’aurait donc d’autre possibilité, s’il n’existait l’Opportunity Fire que d’attendre ou d’envoyer des unités au " casse-pipe ". Désormais, le joueur peut attendre l’adversaire au tournant de l’AFPh. Et si finalement il ne s’est toujours pas découvert, les unités en mouvement auront au moins pu se déplacer en " sécurité ".

Voilà donc exposés les principaux changements que l’on peut redouter ou espérer entre la PFPh et l’AFPh. Le fait que l’Opportunity Fire permette de profiter de ces changements est le moteur de quelques tactiques intéressantes, dont on ne donnera ici que les principes.

Les unités en éclaireur

Face à une position ennemie Concealed ou Hidden, l’utilité de l’Opportunity Fire a déjà été évoquée. Tout le ressort de la manœuvre réside dans l’appréciation de la situation par l’adversaire : doit-il attaquer les unités en mouvement qui se rapprochent de ses lignes et risquer de dévoiler son dispositif avant l’APPh, ou peut-il se permettre d’ignorer cette menace et faire " un carton " avec un -1 FFNAM ? Pour le joueur attaquant, le problème se pose différemment : soit il tente d’éliminer les unités ennemies durant la Prep Fire, soit il essaye de leur faire " peur " en massant beaucoup d’unités en Opportunity Fire.

Le front trop large

Le joueur en phase ne peut se permettre d’attaquer tout le dispositif ennemi dans son ensemble. Il doit donc ruser pour ne dévoiler son axe d’effort qu’au dernier moment. Transformer les tirs d’appui en tir de soutien permet de cacher ses intentions à l’adversaire et d’exploiter les faiblesses du dispositif adverse qu’il aurait découvertes durant la MPh.

Protéger une retraite

En cas de déroute, il peut être intéressant de neutraliser les unités ennemies qui pourraient " interdire " certaines unités en déroute. La RtPh étant juste après l’AFPh, des unités en Opportunity Fire pourraient parfaitement remplir ce rôle en attaquant plus particulièrement les unités adverses trop menaçantes pour les unités " en déroute ".

Conclusion

Les possibilités laissées par ASL sont quasi infinies et il faudrait presque une revue entière pour détailler toutes les tactiques possibles à partir de l’Opportunity Fire. En espérant que ces quelques idées aient inspiré certains joueurs, toute autre suggestion est évidemment la bienvenue, car cette liste est loin d’être exhaustive.

Post-scriptum

Article mis en ligne avec l’aimable autorisation de l’ancienne rédaction de Tactiques.


[1On ne parlera pas non plus de l’utilisation de l’Opportunity Fire avec les LATW : le paragraphe A13.8 est suffisamment explicite à propos des contraintes du tir en milieu confiné.

[2Avis à tous les amateurs d’ASL en français : PFPh doit se traduire par "Phase d’Appui" et non " Phase de tir préparatoire ". En effet, les tirs préparatoires ont lieu bien avant l’assaut lui-même. Le tour de jeu ASL, d’une durée de 2 minutes, est trop court pour voir ces deux événements en même temps, à cause de problèmes de synchronisation des tirs. En effet, les tirs préparatoires sont du domaine du régiment, voire de la division, alors que dans ASL, l’assaut est mené au niveau de la compagnie. Dans ASL, les Creeping Barrages, les avions sont des exemples d’actions préparatoires.

[3Les exceptions sont à chercher parmi les unités éliminées, broken, ou parties à l’ascension d’une falaise.

[4C’est un usage un peu particulier des Smoke de véhicules, qui sont initialement destinés à protéger le véhicule lui-même et non l’infanterie environnante. Il faudra d’ailleurs attendre le Pacte de Varsovie pour voir apparaître des écrans de fumée produits par les blindés en vue de protéger l’infanterie.

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